L'enfant perdu.
Epilogue.
Le dernier des grands Seigneurs des Airs s’élança gauchement dans l’air glacial des Thielvériles. Une vie flamboyante coulait à flot dans ses veines. L’appel résonnait clairement, portée par des zéphyrs indolents. Au milieu de la saison des Grands Calmes, la clameur l’éveilla de son interminable retraite, au plus profond des montagnes enneigées. « Moesmihr ! Moesmihr ! ». Jour après jour, Shahomhir, l’illustrissime dragon de braise, se nourrit de leur dévotion envers celui qui, jadis, partageait ses jeux. Plus que tout, l’Admirable désirait connaître les raisons qui poussaient les voix des peuples à célébrer le plus grand des Combattants, après tant de cencycles d’oubli. Même si, il ne s’en cachait pas, Shahomhir ne partageait pas l’engouement de ses ainés pour les races rampantes. Jadis il n’avait pas daigné participer aux ultimes luttes durant la Quatrième Vague. Aux aléas de la bataille, il préférait un repos confortable au cœur de la plus haute des Montagnes, à rêver indéfiniment du temps où les Inconstants le chérissaient entre tous.
Grisé par la lumière céleste, le dragon se jouait des courants ascendants, grimpait au-dessus des plaines nuageuses puis plongeait en piqué, effrayant des vols d’oiseaux qui migraient vers les lointains de l’océan.
« Moesmihr ! Moesmihr ! »
Un amour passionnel accompagnait cet enchantement qu’il était, hélas, le seul à entendre. L’émotion le maintint en alerte, attentif aux fluctuations qui envahissaient l’Ether. Parmi celles-ci, il crut déceler l’éveil d’un Maître-dragon. Désorienté, il vira et volta de nombreuses fois entres les pics abrupts et enneigés, dans la grisaille d’un soir de Kolma, à la recherche de l’enivrante étincelle de Vie. Mais le Sublissime n’était pas de ceux qui se jette, tête baissée, dans l’aventure. Il se plaisait à méditer. Réfléchir intensément, patiemment. Longuement. Seulement le faible signal s’effaça à peine éclos. Alors la frustration le poussa à dévaster un pan boisé de malheureux sapins, rôtissant arbres, herbes, vie animale dans une joyeuse flambée. Puis il regagna son refuge, ne dormant que d’un œil, bercé par la vénération du peuple de Galadorm.
Second Tome du Cycle d’Yrathiel : Le Fils des Vents.